Hope Services LLC v Republic of Cameroon - ICSID Case No. ARB/20/2 - Decision on the Proposal for Disqualification - French - Décision sur la Demande de récusation du Professeur Pierre Mayer - 21 August 2020
Country
Year
2020
Summary
Reproduced from www.worldbank.org/icsid with permission of ICSID.
I. INTRODUCTION ET HISTORIQUE DE LA PROCÉDURE
1. Cette décision concerne la requête aux fins de récusation du Professeur Mayer (la « Demande de récusation »)[1] déposée par la Demanderesse le 7 juillet 2020. Le résumé qui suit ne se veut pas exhaustif et porte uniquement sur les éléments de procédure relatifs à la Demande de récusation.
2. Le 19 décembre 2019, Hope Services LLC (« Hope » ou la « Demanderesse ») a soumis une Requête d'arbitrage au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (« CIRDI » ou le « Centre ») contre la République du Cameroun (le « Cameroun » ou la « Défenderesse »), conformément à la Convention pour le règlement des différends relatifs aux investissements entre États et ressortissants d'autres États (la « Convention CIRDI »). Cette requête était accompagnée des pièces factuelles C-1 à C-194, des pièces juridiques CL-1 à CL-15, d'un rapport d'expertise de Juliette Fortin et des pièces FTI-1 à FTI-29.
3. Le 13 janvier 2020, le Secrétaire général du CIRDI a enregistré la Requête d'arbitrage.
4. Par lettres en date du 19 février 2020, les Parties ont convenu de la méthode de constitution du Tribunal. Aux termes de cet accord, le Tribunal, comprenant trois arbitres, serait constitué comme suit :
« Le Demandeur désigne un arbitre dans un délai de 30 jours suivant la communication par laquelle le CIRDI confirmera l'accord final des Parties sur la méthode de constitution du Tribunal ;
Le Défendeur désigne un arbitre dans un délai de 30 jours suivant la communication par laquelle le CIRDI indiquera aux Parties que l'arbitre désigné par le Demandeur a accepté sa nomination ;
Les deux arbitres ainsi nommés désignent le Président du Tribunal Arbitral après consultation des Parties et dans un délai de 30 jours suivant la communication par laquelle le CIRDI indiquera aux Parties que l'arbitre désigné par le Défendeur a accepté sa nomination ;
Si l'une des Parties ne désigne pas son arbitre ou que les deux arbitres désignés par les Parties n'arrivent pas à s'accorder sur le choix du Président du Tribunal dans les délais exprimés ci-avant, le Président du Conseil Administratif du CIRDI désignera le ou les arbitres manquants ainsi que le Président du Tribunal Arbitral ».
5. Par lettre en date du 6 mars 2020, la Demanderesse a nommé M. le Professeur Nassib G. Ziadé en tant qu'arbitre dans cette affaire. Le Professeur Ziadé a accepté sa nomination le 10 mars 2020.
6. Par lettre en date du 3 avril 2020, la Défenderesse a nommé Me Frédéric Joachim en tant qu'arbitre dans cette affaire. Me Joachim a accepté sa nomination le 7 avril 2020.
7. Par lettre en date du 20 avril 2020, la Défenderesse a nommé M. le Professeur Pierre Mayer comme arbitre en remplacement de Me Joachim.
8. Par lettre en date du 6 mai 2020, la Défenderesse a confirmé la nomination du Professeur Mayer en tant qu'arbitre. Le Professeur Mayer a accepté sa nomination le 7 mai 2020.
9. Par lettre en date du 19 mai 2020, la Demanderesse a informé le Secrétariat du CIRDI de son « [étonnement] de voir que M. le Professeur Pierre Mayer a rempli la déclaration prévue à l'article 6(2) du [Règlement de procédure relatif aux instances d'arbitrage du CIRDI (le « Règlement d'arbitrage CIRDI »)] en cochant la case `aucune déclaration' » et qu' « [u]ne recherche rapide sur internet a permis d'établir que M. le Professeur Pierre Mayer a été par le passé le conseil de l'État du Cameroun au cours de la procédure d'arbitrage CIRDI ARB/81/2 Klöckner Industrie-Anlagen GmbH and others v. United Republic of Cameroon and Société Camerounaise des Engrais ». La Demanderesse a demandé au Centre « qu'il prenne attache avec M. le Professeur Pierre Mayer afin d'établir les circonstances exactes dans lesquelles ce dernier a représenté l'État camerounais par le passé et jusqu'à quelle date le Professeur a entretenu des relations professionnelles et notamment de conseil avec la République du Cameroun ».
10. Par courriel en date du 21 mai 2020, le Professeur Mayer a transmis le message suivant aux Parties :
« Il y a 32 ans, alors que j'étais consultant au cabinet Coudert, j'ai participé à la défense du Cameroun dans l'affaire qui l'opposait à la société Klöckner : j'ai présenté une partie de la plaidoirie devant le Comité ad hoc. Je précise que je n'ai reçu aucune rémunération du Cameroun pour cette activité et n'ai eu aucun lien contractuel avec lui. Je n'ai eu aucun lien avec le Cameroun depuis cette affaire.
Malgré l'écoulement d'une aussi longue période de temps, je n'aurais pas manqué de révéler, par précaution et non par obligation, cet épisode s'il m'était revenu à la mémoire ».
11. Le 15 juin 2020, suite à une procédure de scrutin, le Centre a informé les Parties que celles- ci avaient nommé Mme le Professeur Maxi Scherer en tant que président du Tribunal.
12. Le 25 juin 2020, le Secrétaire général du CIRDI a, conformément à l'article 6(1) du Règlement d'arbitrage CIRDI, notifié aux Parties que les trois arbitres avaient accepté leur nomination et que le Tribunal était donc réputé constitué à cette date. M. Benjamin Garel, Conseiller juridique au CIRDI, a été désigné en qualité de Secrétaire du Tribunal.
13. Le 7 juillet 2020, la Demanderesse a déposé sa Demande de récusation, accompagnée des pièces factuelles C-195 à C-198 et des pièces juridiques CL-16 à CL-40.
14. Par lettre en date du 7 juillet 2020 accompagnant la Demande de récusation, la Demanderesse a émis la remarque suivante :
« Le curriculum vitae de Mme le Professeur Scherer communiqué le 5 juin 2020 indique qu'elle est titulaire d'un DEA `en droit international privé et commercial' octroyé en 1999 par l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne.
Il ressort également d'informations librement accessibles au public que M. le Professeur Mayer a été le Directeur du DEA (devenu Master 2) en droit international privé et du commerce international de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne entre 1984 et 2012.
Il semble donc, sous réserve que la légère déformation de l'intitulé de ce diplôme dans le CV de Mme le Professeur Scherer ne soit qu'une erreur de plume, que celle-ci fut étudiante au sein du diplôme universitaire que dirigeait à l'époque M. le Professeur Mayer ».
La Demanderesse a sollicité que :
« Si tel devait être le cas, [...] Mme le Professeur Scherer [...] se déporte du rôle qu'elle devrait être amenée à jouer dans la procédure de récusation de M. le Professeur Mayer, et que la demande de récusation jointe au présent courrier soit transmise au Président du Conseil Administratif en application de l'article 9(4) du Règlement d'arbitrage ».
15. Par lettre du même jour, le Secrétaire du Tribunal a accusé réception de la Demande de récusation déposée par la Demanderesse et du courrier l'accompagnant. Le Secrétaire du Tribunal a par ailleurs informé les Parties que :
« L'article 58 de la Convention CIRDI prévoit que la demande de récusation du professeur Mayer sera décidée par les autres membres du Tribunal. Nous notons à cet égard que la Demanderesse demande que le professeur Scherer se déporte de la procédure de récusation et que la requête soit transmise au Président du Conseil administratif du CIRDI en application de l'article 9(4) du Règlement d'arbitrage du CIRDI.
Je transmets le courrier de la Demanderesse et sa requête aux membres du Tribunal. Conformément à l'article 9(4) du Règlement d'arbitrage du CIRDI, l'instance est suspendue jusqu'à ce qu'une décision ait été prise au sujet de la requête.
Un calendrier procédural relati[f] aux observations des parties et du professeur Mayer sera établi sous peu ».
16. Par lettre en date du 10 juillet 2020, la Défenderesse a présenté ses commentaires sur le courrier de la Demanderesse en date du 7 juillet 2020.
17. Par lettre en date du 13 juillet 2020, le Professeur Scherer a présenté ses commentaires sur la lettre de la Demanderesse du 7 juillet 2020 et a estimé qu'il n'y avait pas lieu pour elle de se déporter de la procédure de récusation en cours.
18. Par lettre en date du 15 juillet 2020, le Secrétaire du Tribunal a transmis aux Parties le calendrier procédural suivant :
« (i) La Défenderesse est invitée à soumettre une réponse à la Demande de récusation dans un délai de sept jours à compter de la réception du présent courrier, soit le mercredi 22 juillet 2020 au plus tard ;
(ii) Le professeur Mayer soumettra, s'il le souhaite, les explications qu'il souhaite apporter, conformément à l'article 9(3) du Règlement d'arbitrage du CIRDI, au plus tard le mercredi 29 juillet 2020 ;
(iii) Les Parties pourront déposer simultanément toutes observations supplémentaires qu'elles souhaitent faire en rapport avec la Demande de récusation dans un délai de sept jours à compter de la date de réception des explications fournies, le cas échéant, par le professeur Mayer. Les Parties sont invitées à soumettre ces observations supplémentaires au Secrétaire du Tribunal sans mettre en copie la Partie adverse. Une fois les observations de chaque Partie reçues, le Secrétaire du Tribunal les transmettra simultanément aux Parties ».
19. Le 22 juillet 2020, la Défenderesse a soumis sa Réponse à la Demande de récusation du Professeur Mayer accompagnée de la pièce factuelle R-1 et des pièces juridiques RL-1 à RL-5 (la « Réponse »).
20. Par lettre en date du 24 juillet 2020, le Professeur Mayer a fourni ses explications aux Parties, conformément à l'article 9, alinéa (3), du Règlement d'arbitrage CIRDI.
21. Le 31 juillet 2020, la Demanderesse a soumis ses Observations supplémentaires sur la Demande de récusation (les « Observations supplémentaires »).
22. La Défenderesse n'a pas soumis d'observations supplémentaires.
...
II. POSITIONS DES PARTIES
A. POSITION DE LA DEMANDERESSE
B. POSITION DE LA DÉFENDERESSE
III.OBSERVATIONS DU PROFESSEUR MAYER
IV. ANALYSE
A. RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE DE RÉCUSATION
B. BIEN-FONDÉ DE LA DEMANDE DE RÉCUSATION
V. DÉCISION
89. Après avoir examiné l'ensemble des faits allégués et les arguments soumis par les Parties, et pour les raisons énoncées ci-dessus, les arbitres ne faisant pas l'objet de la Demande de récusation du Professeur Mayer, rejettent celle-ci.
...
[1] Les expressions « Demande de récusation » et « Requête aux fins de récusation » ont été utilisées dans les correspondances. L'expression « Demande de récusation » sera utilisée dans la présente décision.